Buffett Indicator : une fenêtre sur l’avenir des marchés ?

“Si l’histoire suffisait à prévoir l’avenir, les bibliothécaires seraient les personnes les plus riches du monde.”

– Warren Buffett

En 1999, lors de son discours à la conférence Allen Sun Valley, Warren Buffett fait une prévision inquiétante. 

Il prédit, contre toute attente, que le retour annuel moyen des marchés financiers sur les 17 prochaines années… 

Sera de 6%.

(Il se base sur le Dow Jones Industrial – DJA – un indice qui représente une moyenne de 30 grandes entreprises américaines pour refléter la performance globale du marché américain).

Quand ils entendent sa prédiction, les investisseurs s’étranglent et d’autres se moquent de lui :

Sur les 17 années précédentes, le cours du Dow a été multiplié par 10, réalisant une performance totale de +949% !

Leur prédiction ? 

Au vu des performances des dernières années…

Le marché devrait offrir un rendement moyen annualisé de +22,6%.

Et pourtant, 17 ans plus tard, en 2016, alors qu’une étude menée par Forbes teste les rendements sur la période… 

Leurs résultats stupéfient les investisseurs. 

Alors que Buffett avait prédit +6% de rendement annuel moyen, l’étude démontre que les rendements s’élevent à… 

+5,9%.

Warren Buffett avait réussi à prédire les retours des marchés, sur une période de 17 ans, avec une marge d’erreur infinitésimale de 0,1%.

(Au Moyen-âge, on était condamné au bucher pour sorcellerie pour moins que ça 😂).

Comment a-t-il fait ? 

Il s’est basé sur ce que l’on appelle désormais “l’indicateur Buffett” (Buffett indicator).

Cet indicateur repose sur un principe simple mis en avant par Warren Buffett : 

Si le cours des actions est un signe pour prédire les bénéfices futurs de l’entreprise, et que leurs produits seront ensuite vendus, participant à l’économie nationale… 

Alors pour déterminer si le marché est surévalué ou non, il suffit de comparer la capitalisation boursière au PIB du pays. 

L’équation ressemble à ça : 

Capitalisation boursière totale / PIB nominal x 100.

Ce que cela te montre ? 

Si le taux est supérieur à 100%, cela veut dire que le marché est surévalué.

S’il est inférieur à 100%, c’est qu’il est sous-évalué. 

(Cette formule simple permet d’évaluer rapidement si les performances des actions reposent sur des fondamentaux – soit une croissance réelle de l’économie – ou si elle est juste le produit du sentiment des investisseurs, ce qui pourrait mener à une bulle spéculative).

Et jusqu’à présent, cet indicateur a été plutôt précis :

Comme tu le vois en fonction de la ligne rouge, il a réussi à prédire la crise pétrolière de 1970, la crise de la bulle internet des années 2000, et la crise des taux d’intérêts négatifs de 2021.

(Avec un raté significatif où la crise de 2008 – GFC – est passée sous son radar ou pas loin 😅).

Alors est-ce que selon cet indicateur, le marché est surévalué aujourd’hui ?

Malheureusement oui. 

Actuellement, le taux du Buffett Indicator est autour de 208%.

Ce qui, selon les anciens seuils de Buffett, prouverait qu’une crise est imminente.

Mais ATTENTION ! 

Depuis sa création en 1999, l’économie mondiale, la globalisation et le ratio des marchés en fonction du PIB ont bien évolué.

La preuve avec l’exemple des Magnificent 7, les 7 entreprises qui dominent actuellement les marchés américains.

(À elles seules, elles sont responsables de près de 30% des gains sur le S&P 500).

Regarde la part de leur chiffre d’affaires réalisé à l’étranger : 

  • Apple : 60%
  • Amazon : 30%
  • Meta : 55%
  • Microsoft : 50%
  • Nvidia : 80%
  • Tesla : 50%
  • Google : 54%

Tu vois qu’au total, plus de 50% de leur CA provient de l’étranger, ce qui n’est pas comptabilisé dans le PIB américain. Ce qui fausse les mesures de l’indicateur.

Donc si tu veux utiliser cet indicateur dans le monde d’aujourd’hui, les seuils doivent évoluer :

  • Moins de 100% : le marché est nettement sous-évalué ;
  • Entre 100 – 150% : le marché est au juste prix
  • Entre 150 – 175% : le marché peut être surévalué

La preuve, l’année dernière, fin 2023, l’indicateur donnait une mesure à 180,5%.

Est-ce que c’était le signe qu’il fallait fuir les marchés ? 

Non ! 

Ou alors, tu aurais manqué +23,8% de gains sur le S&P 500 cette année.

Voilà pourquoi, même si certains indicateurs peuvent être intéressants pour prendre le pouls des marchés, ils ne doivent pas être utilisés aveuglément.

(Même chose pour le P/E ratio du S&P 500 et ceux qui fuient le navire dès qu’il dépasse les 25…).

À la place, utilise les pour prendre une décision éclairée.

Si tu as un profil qui ne tolère pas le risque, ou que tu as un horizon d’investissement qui approche à son terme, ou que ton portefeuille penche trop du côté des actions…

Cela peut être l’occasion pour toi de diriger une partie de ton DCA vers des actifs plus sécurisés et moins fluctuants comme des obligations ou l’or.

Et c’est aussi l’occasion de te rappeler cette leçon que tous les investisseurs devraient se faire tatouer : 

Les performances passées ne prédisent pas des performances futures.

Ne sois pas aveuglé par les rendements des dernières années parce que c’est ton expérience la plus récente avec les marchés… 

Ne fais pas comme les investisseurs de 1999, qui, après avoir vu +949% sur le Dow en 17 ans, ont fait le même pari sur les 17 prochaines années pour s’en mordre les doigts.

Beaucoup auraient mieux fait de se diversifier dans d’autres actifs qui ont battu les actions. 

Comme l’or de 2004 à 2016 qui a éclaté le Dow :

Donc ne te laisse pas abuser par les performances récentes du marché pour prendre des décisions, penser à te diversifier et prend les indicateurs pour ce qu’ils sont : 

Des mesures qui te donnent un ordre d’idée de ce qu’il se passe, et non pas des vérités absolues.

Bonne chance pour tes investissements !

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